Irrégularité du bon de commande : Le manque d’information provoque la nullité du bon de commande
La Cour d’Appel de Pau réaffirme la nullité du bon de commande en présence d’irrégularités dans celui-ci mais également la nullité du crédit affecté, du fait des mêmes irrégularités.
Dans cette affaire, il était question d’un contrat portant sur la fourniture et la pose d’une centrale photovoltaïque et d’un chauffe eau thermodynamique par la Société LME SAS financé par un prêt affecté proposé par la banque COFIDIS. Plusieurs irrégularités apparaissaient sur le bon de commande.
La Cour d’Appel de Pau a jugé que conformément au code de la consommation, le vendeur doit informer l’acheteur de manière lisible et compréhensible en faisant apparaître certaines mentions essentielles sur le bon de commande. Cette obligation est nécessaire afin que le consommateur puisse s’engager en connaissance de cause et afin de pouvoir faire une comparaison avec d’autres offres sur le marché.
Le bon de commande litigieux ne comportait pas le modèle des panneaux photovoltaïque, leur marque, les informations essentielles sur la variation de productivité de l’installation, l’identité du démarcheur et une date ou délai de livraison.
La Cour précise qu’il a été généralement admis ( Civ 1ère, 24 janvier 2024, n°22-16.115) que la présence des articles du code de la consommation sur le contrat ne pouvait justifier l’absence de ces informations, tout comme la signature par le client du procès verbal de livraison ou le raccordement de l’installation.
Dès lors, le bon de commande est nul, ce qui a pour effet de provoquer la nullité du contrat de crédit qui lui est affecté. La banque doit donc rembourser les échéances perçues jusque là et la société est condamnée à démonter et enlever l’installation à ses frais.
Décisions de justice
Cour d’appel de Pau – 2ème CH – Section 1 – 7 mai 2024 – n° 22/01197
Texte intégral
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
PhD/VC Numéro 24/1546
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1 ARRET DU 07/05/2024
Dossier : N° RG 22/01197 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IGDQ Nature affaire :
Demande en nullité de la vente ou d’une clause de la vente Affaire :
S.A. COFIDIS C/
[R] [M] épouse [W]
[T] [W]
S.A.S. LME Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 07 mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 05 Mars 2024, devant :
Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l’appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Jeanne PELLEFIGUES et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTE :
S.A. COFIDIS
société à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de Lille Metropole n° 325 307 106
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilé en cette qualité au siège, [Adresse 8]
[Localité 2]
Représentée par Me Julie CHATEAU de la SCP JEAN LUC SCHNERB-JULIE CHATEAU anciennement D. LACLAU, avocate au barreau de Pau
assistée de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HACOËT HÉLAIN, avocat au barreau de l’Essonne INTIMES :
Madame [R] [M] épouse [W]
née le 25 Octobre 1980 à [Localité 6] (50) de nationalité Française
adjointe administrative, [Adresse 1]
[Localité 4] Monsieur [T] [W]
né le 08 Juin 1972 à [Localité 7] (Maroc) de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentés par Me Francois DUFFAU, avocat au barreau de Pau
S.A.S. LME
immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro n° 788 979 383
agissant poursuites et diligences de son representant légal domicilé en cette qualité au siège, [Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Emmanuelle LAGARDE, avocat au barreau de Pau Assistée de Me Yoni MARCIANO, avocat au barreau des Hauts-de-Seine Sur déféré de l’ordonnance
en date du 13 AVRIL 2022
rendue par le CONSEILLER DE LA MISE EN ETAT DE PAU RG 11-19-272
FAITS – PROCEDURE – PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Suivant bon de commande signé le 18 juillet 2018, hors établissement, Mme [R] [W] a commandé à la société LME (sas) la fourniture et l’installation de 20 panneaux photovoltaïques et d’un ballon thermodynamique moyennant le prix de 26.900 euros financé par un crédit affecté souscrit le même jour par Mme [W] et son époux, M. [T] [W] auprès de la société Cofidis (sa).
Le 1er septembre 2018, Mme [W] a signé l’attestation de livraison et de mise en service. Le 22 novembre 2018, l’installation a été raccordée au réseau Erdf.
Contestant la régularité de l’opération, les époux [W] n’ont pas réglé les échéances du prêt.
Suivant exploits des 27 mars 2019 et 1er avril 2019, les époux [W] ont fait assigner la société LME et la société Cofidis par devant le juge des contentieux de la protection de Pau en nullité ou résolution du bon de commande et en nullité ou résolution, par voie de conséquence, du contrat de crédit affecté.
Par jugement contradictoire du 19 avril 2021, le juge des contentieux de la protection a :
-prononcé l’annulation du contrat de vente conclu le 18 juillet 2018,
-condamné la société LME à effectuer à ses frais le démontage et l’enlèvement des éléments vendus et à procéder à la remise des lieux dans leur état initial, et ce, dans le délai de 60 jours calendaires à compter de la signification du présent jugement et passé ce délai sous astreinte de 25 euros par jour de retard,
-dit que le juge des contentieux de la protection se réserve la compétence pour liquider l’astreinte,
-dit que passé le 380 ème jour après la signification du jugement, les époux [W] seront libres de disposer du matériel comme bon leur semble,
-prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu entre les époux [W] et la société Cofidis,
-condamné la société Cofidis à rembourser la somme de 308,43 euros par mois à compter du 5 mai 2019 jusqu’à complet paiement aux époux [W],
-débouté la société Cofidis de l’intégralité de ses demandes,
-condamné la société LME et la société Cofidis à payer aux époux [W] la somme de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-débouté les parties de toute autre demande non satisfaite,
-condamné solidairement la société LME et la société Cofidis aux dépens,
-ordonné l’exécution provisoire du jugement.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 29 mai 2021, la société Cofidis a relevé appel de ce jugement.
Par arrêt infirmatif du 13 octobre 2022, la cour d’appel de céans a prononcé la caducité de la déclaration d’appel formée par la société Cofidis contre les époux [W] et dit que l’instance d’appel se poursuit entre la société Cofidis et la société LME.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 14 février 2024.
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Vu les dernières conclusions notifiées le 6 février 2024 par la société Cofidis qui a demandé à la cour d’infirmer le jugement sur les conséquences de la nullité des conventions, et, statuant à nouveau, de :
-condamner la société LME à lui payer la somme de 31.514,18 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
-à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société LME à lui payer la somme de 26.900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
-condamner la société LME à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
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Vu les dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2021 par les époux [W] qui ont demandé à la cour de :
-confirmer le jugement, sauf en ce qu’il les a déboutés de leur demande de radiation du Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) sous astreinte,
-enjoindre à la société Cofidis de demander à la Banque de France la radiation de chacun des époux [W] du Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt,
-débouter la société Cofidis de ses demandes formulées contre eux,
-condamner la société LME à restituer directement à la société Cofidis la somme de 26.900 euros ou, à défaut, de condamner la société LME à payer cette même somme à Mme [R] [W],
-déchoir à défaut totalement du droit aux intérêts la société Cofidis sur le crédit affecté querellé,
-dire que les époux [W] sont uniquement redevables du seul capital emprunté à l’exclusion de tout intérêt, cotisation ou frais à l’égard de la société Cofidis,
-ordonner la société Cofidis de leur notifier un nouveau tableau d’amortissement de même durée mais tenant compte de la déchéance totale du droit aux intérêts,
-condamner la société Cofidis à leur payer la supplémentaire de 3 600,00 euros au titre des frais irrépétibles.
*
Vu les dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2021 par la société LME qui a demandé à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la nullité du bon de commande et du crédit affecté et de :
-débouter les époux [W] de leurs demandes,
-condamner solidairement les époux [W] à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-à titre subsidiaire, en cas d’annulation du contrat, débouter la société Cofidis de ses demandes à son égard.
MOTIFS
observations liminaires sur la saisine résiduelle de la cour
A la suite de l’arrêt du 13 octobre 2022 ayant prononcé la caducité de la déclaration d’appel de la société Cofidis à l’égard des époux [W], seule la société Cofidis a réactualisé ses prétentions dans ses dernières conclusions, les époux [W] et la société LME s’en tenant à leurs conclusions antérieures au dit arrêt.
La caducité de l’appel de la société Cofidis à l’égard des époux [W] a mis fin à l’instance opposant ces deux parties, emportant extinction de l’appel incident des époux [W], de sorte que la cour n’est plus saisie d’aucune prétention concernant celles-ci.
Il n’y a donc pas lieu à statuer de ces chefs. La cour demeure saisie de :
-l’appel incident de la société LME sur la nullité du contrat de vente du 18 mai 2018 dont la survie n’est pas incompatible avec l’annulation définitive du contrat de crédit affecté,
-l’appel de la société Cofidis sur son action récursoire contre la société LME. sur la nullité du contrat de vente du 18 juillet 2018
La société LME fait grief au jugement entrepris d’avoir annulé, sur le fondement du droit de la consommation, le bon de commande du 18 juillet 2018 alors que ce document contractuel est rigoureusement conforme aux prescriptions légales édictées à peine de nullité et que, en tout état de cause, les époux [W] ont volontairement ratifié les éventuelles nullités alléguées en poursuivant l’exécution du contrat jusqu’à son terme, mettant en service et exploitant l’installation photovoltaïque et alors qu’ils avaient pu se convaincre des dites nullités en prenant connaissance des dispositions légales relatives aux opérations conclues hors établissement reproduites dans les conditions générales du bon de commande.
Mais, il résulte des articles L. 111-1, L. 111-2, L. 111-5, L. 111-8, L. 211-2, L. 211-3, L. 221-5, L. 221-7
à L. 221-9, L. 221-29, L. 222-5, L. 222-18 et L. 242-1 du code de la consommation, qui sont des dispositions d’ordre public de protection, que le contrat conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
-l’identité et les coordonnées du professionnel et de toute personne agissant pour son compte,
-les informations relatives aux coordonnées postales, téléphoniques et électroniques du professionnel,
-le lieu de conclusion du contrat,
-les caractéristiques essentielles du bien ou du service,
-le prix du bien ou du service,
-la date de livraison ou le délai d’exécution de la prestation,
-les informations relatives à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties légales et contractuelles,
-les conditions, le délai et les modalités d’exercice du droit de rétractation,
-le formulaire type de rétractation,
-le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste,
-l’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de fourniture d’électricité dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation,
-la possibilité de recourir à une procédure extrajudiciaire de règlement des litiges et les modalités d’accès à celle-ci,
-la loi applicable au contrat et la juridiction compétente.
En l’espèce, au soutien de son appel, la société LME a produit un bon de commande signé par les époux [W], en date du 18 juillet 2018, portant sur la fourniture et l’installation de 10 panneaux photovoltaïques au prix de 9.556,15 euros, d’une pompe à chaleur au prix de 13.715 euros et d’un ballon thermodynamique au prix de 3.628,84 euros, au prix total de 26.900 euros financé par un crédit au taux débiteur de 2,73 %.
Cependant, ce bon de commande n’a jamais été exécuté ni financé, les parties ayant régularisé le même jour un autre bon de commande, par l’intermédiaire d’un autre commercial, portant sur 20 panneaux photovoltaïques et un ballon thermodynamique, au prix global de 26.900 euros financé par le crédit affecté au taux débiteur de 2,65 %.
La simple lecture de ce bon de commande permet de constater qu’il est affecté de multiples irrégularités formelles viciant les informations légalement requises que le vendeur doit délivrer au consommateur pour lui permettre de s’engager en connaissance de cause et, le cas échéant, de procéder préalablement à la comparaison des offres de marché.
En effet, les caractéristiques essentielles des biens vendus ne sont pas mentionnées : il n’existe aucune désignation des modules photovoltaïques fournis, seuls leur nombre et leur puissance étant mentionnés, le bon de commande ne précisant pas notamment la marque des modules, ni la marque de l’onduleur ni celle du ballon, celui-ci ne présentant même aucune spécification technique.
Ensuite, et alors que les conditions générales de ventes stipulent une garantie sur la productivité de la centrale photovoltaïque, le bon de commande ne comporte pas les informations essentielles sur les variations de productivité, et la signature par le consommateur de la clause générale pré-imprimée par laquelle il reconnaît avoir reçu « toutes les informations relatives aux produits », qui ne renseigne pas sur la consistance de ces informations ou le support qui les contient, est inopérante à démontrer que les époux
[W] ont effectivement reçu une information technique sur les produits fournis.
L’identité du démarcheur agissant pour le compte du professionnel n’est pas précisée dès lors que ni son nom ni son prénom ne sont mentionnés, seule figurant une signature indéchiffrable.
La date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service : malgré les deux options prévues dans l’encart « DELAIS », aucune case n’est cochée et aucune date n’est précisée après la phrase « date de livraison sous ».
Chacune des irrégularités ci-avant relevées suffit à corrompre la validité du bon de commande qui laisse au vendeur toute latitude pour imposer la fourniture de biens et services sur lesquels le consommateur ne peut exercer un véritable contrôle de conformité lors de la livraison.
Concernant la ratification des nullités, il résulte du revirement récent de la jurisprudence (Civ 1ere 24 janvier 2024 n°22-16.115) que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d’avoir une connaissance effective du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l’absence de circonstances, qu’il appartient au juge de relever, permettant de justifier d’une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l’envoi par le professionnel d’une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l’article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l’article 9 de cette ordonnance, aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.
Par ailleurs, il ne résulte d’aucun élément de la cause, que les époux [W] ont pu se convaincre des vices du bon de commande dont l’exécution s’est poursuivie selon le bon vouloir de la société LME, étant privés des informations essentielles nécessaires à l’exercice d’un contrôle effectif de la conformité de la prestation fournie avec les engagements contractuels de la société LME, de sorte qu’il ne peut être déduit du procès-verbal de la livraison et du raccordement de l’installation d’une quelconque volonté de leur part de confirmer les vices affectant leur engagement, d’autant qu’ils se sont inquiétés très rapidement des conditions dans lesquelles la société LME avait rempli ses obligations et ont refusé d’exécuter le contrat de crédit affecté.
Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du bon de commande du 18 juillet 2018.
Les autres dispositions du jugement n’ayant pas été remises en cause, hors l’hypothèse du rejet de la demande de nullité, le jugement sera confirmé en ce qu’il a :
-condamné la société LME à effectuer à ses frais le démontage et l’enlèvement des éléments vendus et à procéder à la remise des lieux dans leur état initial, et ce, dans le délai de 60 jours calendaires à compter de la signification du présent jugement et passé ce délai sous astreinte de 25 euros par jour de retard,
-dit que le juge des contentieux de la protection se réserve la compétence pour liquider l’astreinte,
-dit que passé le 380 ème jour après la signification du jugement, les époux [W] seront libres de disposer du matériel comme bon leur semble.
Cependant, sur la mesure d’astreinte dont le prononcé relève du pouvoir discrétionnaire du juge, le jugement sera complété en ce sens que l’astreinte courra pendant un délai d’une durée de 365 jours.
sur l’action récursoire de la société Cofidis
La société Cofidis fait grief au jugement d’avoir rejeté sa demande de condamnation de la société LME alors qu’elle est fondée à demander l’indemnisation de son préjudice né de l’annulation du contrat de crédit affecté imputable à la faute du vendeur, soit sur le fondement de la convention crédit vendeur photovoltaïque liant les parties en date du 22 mai 2018, soit sur le fondement délictuel, soit sur le fondement de l’enrichissement sans cause.
La société LME objecte que cette action est infondée, soit qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de la convention du 22 mai 2018, soit que le préjudice allégué est imputable à la faute du prêteur dans le déblocage des fonds et la vérification du bon de commande.
Mais, en premier lieu, les époux [W] ont demandé à la cour de condamner la société LME à restituer directement à la société Cofidis la somme de 26.900 euros ou, à défaut, de condamner la société LME à payer cette même somme à Mme [R] [W].
Le tribunal n’avait pas été saisi de cette demande qui est la conséquence nécessaire des prétentions initiales des époux [W], créanciers de la restitution du prix du contrat de vente annulé.
En obtenant la décharge de leur obligation de rembourser le prêt, les époux [W] ont été indemnisés de leur préjudice né du financement d’une opération commerciale annulée dont les aléas de la restitution du prix de cession par le vendeur ont été mis à la charge de la société Cofidis.
Cette indemnisation, qui intéresse les rapports de l’emprunteur et du prêteur, laisse intacte la créance de restitution du prix sur le vendeur.
Les époux [W] ont ainsi manifesté leur accord aux fins de voir céder leur créance de restitution du prix à la société Cofidis, dont le montant est équivalent aux dommages et intérêts réclamés par celle-ci.
En outre, l’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l’espèce, l’annulation du crédit affecté est exclusivement imputable aux fautes commises par la société LME à l’occasion de la formation du contrat de vente financé par le crédit affecté.
La société LME doit répondre du préjudice subi par la société Cofidis du fait de cette annulation, sans pouvoir opposer à celle-ci, avec laquelle elle n’a aucun lien contractuel, sa faute, dans ses rapports avec les époux [W], pour défaut de vérification de la régularité du bon de commande.
Le préjudice de la société Cofidis consiste dans la perte du capital prêté du fait de la décharge des époux
[W] de leur obligation de restituer le capital prêté à titre d’indemnisation du risque de ne pas obtenir la restitution du prix de vente due par la société LME.
Il suit des considérations qui précèdent que la société Cofidis est fondée, à un double titre, à demander la condamnation de la société LME à lui payer la somme de 26.900 euros.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
En revanche, la perte des hypothétiques intérêts contractuels, que n’auraient pas perçu la société Cofidis si elle avait refusé de financer le bon de commande irrégulier, n’a pas de lien de causalité directe et certaines avec les fautes de la société LME.
Le jugement sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.
La société LME sera condamnée aux dépens d’appel et à payer à la société Cofidis une indemnité de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Vu l’arrêt du 13 octobre 2022 ayant prononcé la caducité de l’appel de la société Cofidis à l’égard des époux [W],
CONFIRME le jugement entrepris des chefs déférés à la connaissance de la cour, à l’exception de la disposition ayant débouté la société Cofidis de ses demandes contre la société LME et sauf à le compléter sur la durée de l’astreinte provisoire,
INFIRME le jugement en ce qu’il a débouté la société Cofidis de ses demandes contre la société LME, et, statuant à nouveau de ce seul chef,
CONDAMNE la société LME à payer à la société Cofidis la somme de 26.900 euros,
COMPLETE le jugement en ce sens que l’astreinte assortissant la condamnation à effectuer à ses frais le démontage et l’enlèvement des éléments vendus et à procéder à la remise des lieux dans leur état initial, et ce, dans le délai de 60 jours calendaires à compter de la signification du présent jugement et passé ce délai sous astreinte de 25 euros par jour de retard, est limitée à une durée de 365 jours,
CONDAMNE la société LME aux dépens d’appel,
CONDAMNE la société LME à payer à la société Cofidis une indemnité de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
AUTORISE la SCP Schnerb-Chateau, avocat, à procéder au recouvrement direct des dépens d’appel, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente
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