le TI d'Orient condamne solfea et groupe solaire de France
TRIBUNAL D'INSTANCE DE LORIENT
N° minute 2018/
JUGEMENT DU 12 Avril 2018 AU NOM OU PEUPLE FRANÇAIS N°
archives 2018/
DEMANDEURS
Monsieur FLAHAT Eric Madame LE GOFF Stéphanie représentés par Me
HABIB Samuel, avocat au barreau de PARIS substitué par Me CORFMAT Catherine,
avocat au barreau de LORIENT
DÉFENDEURS
La société FRANCE SOLAIRES ENERGIES prise
en la personne de Me HUILLE ERAUD Pascale es qualité de mandataire liquidateur
de ladite société 1 rue René Cassin, 91000 EVRY, non comparant La BNP PARI BAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de
BANQUE SOLFEA 1 Bd Le Goffsmann, 75009 PARIS, représentée par la SCP MAXWELL
BERTIN BARTHELEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX substituée par Me
KERZERHO Philippe, avocat au barreau de LORIENT
COMPOSITION DU TRIBUNAL
JUGE P-0 DANINO GREFFIER E. BLAIN
DÉBATS AUDIENCE du 15 mars 2018
JUGEMENT MIS A DISPOSITION le 12 Avril 2018
N° R.G. 11-17-000834 EXPEDITION revêtue de la formule
exécutoire délivrée à Me CORFMAT, Me KERZERHO COPIE délivrée à Me HUILLE ERAUD
PRETENTIONS ET MOYENS Le 21 juillet 2017,
Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF assignaient la Société
FRANCE SOLAIRE ENERGIE prise en la personne de son mandataire liquidateur, la
SA BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE venant aux droits de la banque SOLFEA exposant
avoir été démarchés dans des conditions laissant croire à une campagne
officielle de la Société ERDF, en vue de permettre la mise en place de panneaux
photovoltaïques autofinancés par la production électrique, Ils signaient ainsi
le 24 juillet 2012 un bon de commande et un contrat de crédit affecté à son
financement. Il s'avérait rapidement que la production électrique d'un montant
annuel de 623,35 euros ne permettait pas de financer les remboursements
nécessaires à l'acquisition de l'installation d'un montant annuel de 2.567,88
euros. Ils considéraient que le contrat était nul du fait de ces manquements,
avoir été victimes d'un dol et d'une pratique trompeuse justifiant la
résolution du contrat principal et par conséquent celle du contrat de crédit
affecté à son financement. La banque spécialisée dans ce type d'opération en ne
procédant à aucune vérification avait commis une faute la privant du droit à
remboursement. Elle n'avait pas respecté son obligation de conseil et avait
prêté son concours à une opération nécessairement ruineuse participant ainsi au
dol de la Société FRANCE SOLAIRE ENERGIE. Elle était également fautive dans la
délivrance des fonds, et avait délivré un crédit mobilier et non un crédit
immobilier plus avantageux. Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF sollicitaient
l'annulation des contrats conclus le 24 juillet 2012 avec la Société FRANCE
SOLAIRE ENERGIE et la Banque SOLFEA, le remboursement par la SA BNP PARIBAS
PERSONNAL FINANCE de la somme de 10.057,53 euros au titre des sommes versées et
subsidiairement sa condamnation à leur payer la même somme à titre de
dommages-intérêts, outre 4.000 euros au titre du préjudice financier, 2.000
euros au titre du préjudice moral, 4.884,10 euros au titre de la
désinstallation des panneaux, subsidiairement qu'il soit ordonné au liquidateur
de la Société FRANCE SOLAIRE ENERGIE de désinstaller les panneaux dans les deux
mois du jugement et passé ce délai la possibilité d'en disposer comme bon leur
semblera, en tout état de cause la condamnation de la SA BNP PARIBAS PERSONNAL
FINANCE à leur payer 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, et aux
dépens, le tout avec exécution provisoire et subsidiairement l' exécution
provisoire sur l'arrêt des prélèvement à venir. La SA BNP PARIBAS PERSONNAL
FINANCE considérait que le contrat avait été exécuté, que l'installation
fonctionnait et que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF avaient attendu 5 ans
pour agir. Elle considérait que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ne
prouvaient ni que l'autofinancement avait été promis, et que même en ce cas,
ils ne justifiaient pas de cette absence d'autofinancement au regard des
économies d'électricité réalisées, au crédit d'impôt qui était partie
intégrante de l'économie du contrat. Ils souhaitaient simplement bénéficier
d'une installation fonctionnant parfaitement gratuitement du fait de
l'impossibilité de la restituer, la Société à Responsabilité Limitée FRANCE
SOLAIRE ENERGIES étant en procédure collective. La SA BNP PARIBAS PERSONNAL
FINANCE considérait que l'annulation du contrat principal et donc du contrat de
crédit affecté conduirait à la remise en état et donc obligerait Cédric FLAHAT
et Stéphanie LE GOFF à restituer le capital prêté soit 20.900 euros sous déduction
des sommes remboursées. Elle estimait la preuve du dol non rapportée. Elle
estimait également que le prêt immobilier n'était pas approprié à l'opération.
La SA BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE estimait ne pas être responsable de
l'éventuel dol de la Société à Responsabilité Limitée FRANCE SOLAIRE ÉNERGIES
et que son obligation de conseil ne portait que sur le contrat de crédit et non
sur le contrat de vente, et de prestation de service et son opportunité.
MOTIFS
Attendu que l'action
en nullité du contrat du 24 juillet 2012 n'est pas prescrite ; Attendu que
contrairement aux dispositions de l'article L 121-23 du Code de la Consommation
dans sa version applicable au contrat celui-ci ne mentionne qu'une installation
solaire photovoltaïque d'une puissance de 2.200 watts comprenant 9 panneaux, un
prix global toute taxe comprise, sans mention de la main d'oeuvre liée à la
pose, du prix de l'installation, de la marque des panneaux, de leur qualité, de
leur technologie dont dépend le rendement, le contrat mentionnant par contre et
de manière très visible que le rendement est garanti 25 ans, mais sans que cc
rendement ne soit connu
Attendu que ces éléments portant sur les qualités
substantielles du produit vendu, laissant croire à une qualité particulière du
produit du fait de la garantie de rendement de 25 ans, de la référence au
slogan d'ERDF et à un partenariat avec cette société alors qu' en l'absence de
la technologie employée, de la marque, des références des produits vendus,
aucun élément ne permet au consommateur de connaître ce rendement, il s'agit au
sens de l'article L 121-1 du Code de la Consommation dans sa version applicable
au contrat d'une pratique trompeuse ;
Attendu que le dol
nécessite une intention de tromper le consentement du co-contratant alors que
les dispositions du Code de la Consommation sanctionnent des manquements, des
abus de présentation du produit, en quelque sorte un enthousiasme commercial
excessif dans la présentation la plus favorable possible de ses produits en vue
de leur vente, pratique inhérente à la vente et dont le cocontractant est censé
avoir conscience, sans qu'il n'existe nécessairement une intention de tromper
le consentement du consommateur même si les abus de cette présentation peuvent
conduire à le tromper ;
Attendu qu'il en résulte que la personne soutenant le dol
doit rapporter la preuve de cette intention ; qu'en l'espèce il n'est mentionné
aucune fausse qualité du produit, aucun rendement fantaisiste, puisque
contrairement aux indications de Cédric FLAIIAT et Stéphanie LE GOFF il n'est
produit aucune projection de rendement de l'installation, il est simplement
vanté un placement rentable ; Attendu que s'il s'avère que l'opération est «
ruineuse » selon les demandeurs, ceux-ci ont mis cinq années à s'en rendre
compte et que lors de l'opération en 2012, les rendements réels des panneau; le
rapport financier réel était largement inconnu tant des prestataires que des
banques, et que la rentabilité de l'opération qui dépendait du prix d'achat
variable chaque année, de la rentabilité, de l'environnement des panneaux susceptibles
d'évoluer dans le temps, rendaient l'appréciation de l'opération
particulièrement complexe pour que le Tribunal ne puisse exclure la bonne foi
de chacun des intervenants ;
Attendu qu'il ne
s'évince nullement des documents produits une intention délictuelle, mais que
par contre il existe un abus manifeste au regard des textes susvisés du Code de
la Consommation dans la présentation de la prestation ne permettant pas au
consommateur de pouvoir l' apprécier et la comparer à d'autres ;
Attendu qu'il en résulte que le contrat ne peut qu'être
annulé sur ces fondements du Code de la Consommation ; Attendu qu'il résulte de
l'article L 311-32 que le contrat de prêt se trouve annulé de plein droit, le
Tribunal constatera celle-ci ;
Attendu que le Tribunal
n'ayant pas reconnu un dol dans le contrat principal, la SA Banque SOLFEA ne
peut y avoir prêté son concours sciemment ;
Attendu qu'il sera remarqué que le contrat litigieux remonte
à 2012, début des litiges en la matière, de sorte qu'il ne peut pas être
utilement argué qu' à cette époque la SABanque SOLFEA avait connaissance des
nombreux litiges qui naissaient seulement et n'étaient pas encore devant les
tribunaux, et que son intérêt était que les installations soit suffisamment
rentables pour permettre aux emprunteurs de la rembourser ;
Attendu que ne serait-ce que pour déterminer les conditions
de libération des fonds, notamment concernant la durée du délai de
rétractation, donc les obligations légales qui pèse sur elle, la banque se
trouve contrainte à un examen au moins succinct du contrat principal ;
Attendu que la SA
Banque SOLFEA, spécialiste du crédit affecté, filiale de la SA BNP PARIBAS
PERSONNAL FINANCE qui se présente comme le numéro un européen du crédit aux
particuliers ne peut ignorer ces dispositions du Code de la Consommation et
qu'un simple examen visuel sans analyse ni interprétation suffit à convaincre
des causes de nullité du contrat principal qui constitue avec le contrat de
crédit aux termes du Code de la Consommation une opération commerciale unique ;
Attendu que la SA Banque SOLFEA était suffisamment
spécialisée en la matière qu'elle proposait des contrat spécifiques â ce type
d'installation ;
Attendu que l'obligation de conseil de la banque défini à
l'article L 311-8 du Code de la Consommation porte sur sa prestation et non sur
celle qu'elle finance, qu'elle a ainsi l'obligation de proposer le prêt le plus
adapté à la situation du débiteur ; Attendu en l'espèce qu'il a été proposé un
crédit à la consommation dont le taux était certes deux fois plus élevé que le
crédit immobilier, mais cependant pas d'un montant excessif ni particulièrement
prohibitif contrairement aux allégations de Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF
et qui peut tout autant s'expliquer par la volonté d'éviter les contraintes
plus importantes du crédit immobilier que par le gain en résultant ;
Attendu que l'article
L 312-2 du Code de la Consommation dans sa version applicable au contrat
précise que le crédit immobilier concerne les travaux d'améliorations de
l'habitat, qu'en l'espèce il s'avère que l'opération visait exclusivement au
financement de panneaux photovoltaïques dont l'intégralité de la production
devait être revendue ainsi qu'il résulte du contrat entre Cédric FLAHAT et
Stéphanie LE GOFF et EDF, et non permettant une réduction de la consommation de
l'immeuble, il ne s'agissait pas de travaux d'amélioration de l'habitat mais
d'un investissement espéré rentable ayant pour support le domicile de Cédric
FLAHAT et Stéphanie LE GOFF, de sorte que le défaut de conseil ne peut pas être
reproché ; qu'au surplus le défaut de conseil entraînant un taux plus élevé est
suffisamment réparé par la perte du droit à intérêt à laquelle conduit toute
annulation du contrat
Attendu que la SA
Banque SOLFEA avait l'obligation d'assurer la sécurité juridique des contrats
qu'elle propose, en prêtant son concours à une opération dont elle
ne pouvait pas ignorer les nullités potentielles multiples,
la SA Banque SOLFEA a nécessairement commis une faute civile par négligence
dont elle doit réparation à Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ;
Attendu cependant que si la réparation de cette faute doit
indemniser le préjudice subi par Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GUET, elle ne
saurait avoir vocation à leur procurer un avantage indu ; Attendu que le
montant de l'installation était de 20.900 euros, que l'installation est
fonctionnelle, que du fait d'une part de l'exécution du contrat, d'autre part
de la faillite de la Société à Responsabilité Limitée FRANCE SOLAIRE ENERGIES
elle ne sera pas reprise, et sera donc conservée par Cédric FLAHAT et Stéphanie
LE GOFF et produit de l'électricité que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF
revendent à ERDF pour une somme moyenne annuelle de 623,25 euros, soit une
espérance de gains sur 20 ans, de 12.465 euros ;
Attendu que Cédric
FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ne pouvaient ignorer que cette installation ne
serait pas éternelle et devrait à un moment être changée et enlevée ou
remplacée, de sorte d'ailleurs que selon l'option choisie la remise en état de
la toiture ne sera pas nécessairement indispensable, et que le coût de son
démontage ne constitue pas un préjudice indemnisable ;
Attendu que Cédric
FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ont bénéficié de l'aide de l'état en la matière
soit pour 2012, 11 % du prix du matériel d'après les recherches du Tribunal en
délibéré, Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF n'ayant pas cru utile d'en
justifier ;
Attendu que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ont déjà
réglé 11.341 euros au titre des échéances, et dont ils sollicitent la restitution
; Attendu qu'il résulte cependant des motivations précédentes que compte tenu
du fait que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF conservent l'installation, de la
production de celle-ci, en tenant compte d'une moindre production au fil des
années, du crédit perçu, sans compter les aides accessoires ( notamment de la
part des collectivités locales), le montant actuellement réglé correspond
globalement aux bénéfices totaux que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF peuvent
espérer retirer de cette opération, de sorte que la conservation par la SA BNP
PARIBAS PERSONNAL FINANCE des mensualités payées, mais sa privation dès la
signification du présent du solde de son droit à remboursement et la dispense
en découlant pour Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF suffit à assurer une juste
réparation de la faute commise par la SA Banque SOLFEA aux droits de laquelle
vient la SA BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE ;
Attendu qu'il
convient également de relever que si la Société à Responsabilité Limitée FRANCE
SOLAIRE ENERGIES a employé des pratiques trompeuses, si la SA Banque SOLFEA a
été négligente, tel a également été le cas de Cédric FLAHAT et Stéphanie LE
GOFF qui ont conclu un contrat pour une somme importante puisque représentant 6
mois de la totalité de leurs ressources mensuelles sans se renseigner, sans
exiger un second devis, et sans la prudence dont doit faire preuve tout un
chacun alors qu'il n'existait aucune urgence à conclure ce type de contrat, de
sorte qu'il n'est nullement injustifié qu'ils conservent à leur charge les
dommages-intérêts qu'ils sollicitent ;
Attendu que le
présent résultant des négligences de la SA Banque SOLFEA, professionnelle qui
devait assurer la sécurité juridique des contrats qu'elle propose, obligation à
laquelle elle a failli, il est justifié qu'elle supporte les frais irrépétibles
de Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF qui seront évalués à 1.800 euros, outre
les dépens
Attendu que le SA BNP
PARIBAS PERSONNAL FINANCE succombe, elle supportera les dépens ; Attendu que
s'agissant d'un décision fondée sur l'état d'exécution actuel des contrats et
dont l'exécution immédiatement ne nuit nullement à une éventuelle réformation,
P exécution provisoire sera ordonnée ;
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal statuant par jugement public, réputé
contradictoire et en premier
ressort:
Reçoit l'action de Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ;
Annule le contrat du 24 juillet 2012 conclu entre la Société à Responsabilité
Limitée FRANCE SOLAIRE ENERGIES et Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF ;
Constate l'annulation de plein droit en résultant du crédit affecté à ce
contrat conclu le 24 juillet 2012 entre Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF et
la SA Banque SOLFEA ; Acte l'impossibilité de restitution de l'installation
objet du contrat principal et le fait que Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF la
conserveront ainsi que les bénéfices en résultant ; Autorise la SA BNP PARIBAS
PERSONNAL FINANCE à conserver les sommes perçues jusqu'à ce jour au titre du
contrat de crédit du 24 juillet 2012 ; Dispense Cédric FLAHAT et Stéphanie LE
GOFF du remboursement du surplus ; Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE
â payer à Cédric FLAHAT et Stéphanie LE GOFF 1.800 euros au titre des frais
irrépétibles ; Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE aux dépens ;
Ordonne P exécution provisoire ; Déboute les parties du surplus ;
Ainsi jugé et prononcé le 12 avril 2018.
Le Greffier,
Le Président.