TRIBUNAL D’INSTANCE de SENS
Cour d’Appel de PARIS
Minute : N° bic:RÔLE : 11-17-000486 AFFAIRE: ROMA Manuel CI GROUPE SOLAIRE DE FRANCE
JUGEMENT DU 02 MAI 2018
Président : GILQUIN-VAUDOUR Arnaud Greffier : BOURGOIN Nicole DEMANDEURS :
Monsieur ROMA Manuel et Madame GENTHIER épouse ROMA Nathalie, assistés de Me HABIB, avocat au barreau de PARIS, substitué par la SCP REGNIER-SERRE-FLEURIER-FELLAH, avocats au barreau de SENS
DÉFENDERESSES :
La société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERG1ES DE FRANCE sous l’enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE dont le siège est sis 32 Rue du Landy, 93300 AUBERVILLIERS, prise en la personne de la SELARLU BALLY M.J es qualité de mandataire liquidateur de ladite société dont le siège est sis 69 Rue d’Anjou 93000 BOBIGNY, non comparante
La société BNP PARIS PERSONAL FINANCE 01 Boulevard Haussmann, 75009 PARIS venant aux droits de la BANQUE SOLFEA représentée par Me MENDES-GIL Sébastien, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me FARIA, avocat au barreau de SENS
DÉBATS : Audience Publique du 04 avril 2018
JUGEMENT : Mis à disposition au greffe le 02 mai 2018
Copies délivrées à : Me HABIB-SCP REGNIER-Me MENDES-GIL-Me FARTA-SELARLU BALLYM.J. Copies exécutoires délivrées à : Me HABIB Le: 0 2 MAI 2013
Vu les dernières conclusions des parties.
La validité du contrat principal
Il résulte de l’article L121-21 6° du code de la consommation que le contrat de vente à crédit conclu suite à un démarchage doit indiquer, à peine de nullité, le taux nominal et le taux effectif global de l’intérêt.
En l’espèce, il n’est pas contesté que le contrat ait été conclu par démarchage. Les contrats produits par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et les demandeurs diffèrent. Si les cases mentionnant le TEG et le taux nominal sur le contrat sont présentes sur les deux exemplaires du contrat, celles-ci ne sont remplies que sur l’exemplaire produit par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE. Les deux contrats étant, outre ces mentions et la TVA, identiques en tout point car fait sur du papier carbone et l’original produit par Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA ne montrant aucune trace d’altération et le juge ayant vérifié qu’une gomme normale ne pouvait pas l’altérer, il apparaît donc que l’exemplaire professionnel du contrat a été modifié après sa signature par Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA. Lors de la signature par Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA, il apparaît donc que le contrat ne faisait pas figurer lesdites indications.
Il résulte de l’article L121-21 4 et 5° du code de la consommation que le contrat conclu suite à un démarchage doit indiquer, à peine de nullité, de manière précise la nature et la caractéristique des biens offerts ou services proposés ainsi que les conditions d’exécution du contrat, notamment quant aux délais.
En l’espèce, le contrat se contente d’indiquer qu’il porte sur la pose d’une «centrale photovoltaïque » d’un total de 5 920 watt-crête. Cette seule indication est insuffisamment précise en ce qu’elle ne permet pas de s’assurer que le consommateur ait connaissance : – des délais par lequel cette installation serait posée, – de la taille de l’installation, celle-ci dépendant, à watt-crête constant, du rendement des panneaux photovoltaïque utilisés, – des différents composants de l’installation, notamment la présence d’un ondulateur qui peut produire un désagrément sonore.
L’article 1338 ancien du code civil dispose que la partie qui exécute le contrat volontairement, c’est-à-dire en connaissant la nullité relative qui affecte celui-ci, renonce à invoquer cette nullité.
En l’espèce, il n’est pas établi que Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA avaient conscience de la cause de nullité du contrat principal lorsqu’ils ont signé l’attestation de livraison. Ils peuvent donc toujours se prévaloir de la nullité, d’autant que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’apporte pas d’élément pour contredire leur bonne foi présumée.
Le contrat principal est donc nul.
La société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE devra donc remettre la toiture en état et récupérer les panneaux photovoltaïques qui seront présumés abandonnés en l’absence de courrier sous six mois.
La validité du contrat de crédit
En application de l’ancien article L311-31 du code de la consommation, le contrat de crédit accessoire est annulé lorsque le contrat principal est annulé. Le contrat de crédit est donc nul.
Les restitutions
En cas de crédit affecté conclu par l’intermédiaire de la société prêteuse, intermédiaire choisi et agréé par elle, et qui est également le vendeur ou prestataire du contrat principal, spécialement lorsque ce contrat principal a été conclu à la suite d’un démarchage à domicile, hypothèse dans laquelle le consommateur est particulièrement vulnérable, le prêteur est tenu, à tout le moins, d’une obligation de vérifier la conformité formelle et apparente du contrat principal. Il en va d’autant plus ainsi lorsque l’organisme de crédit, ce qui est le cas de la société Banque Solféa, se présente comme spécialisée dans les crédits « Pour un habitat éco-efficace » ainsi qu’elle l’indique sur ses contrats.
En s’abstenant d’effectuer cette vérification élémentaire, qui, si elle ne lui aurait pas nécessairement permis de découvrir le faux, lui aurait permis de découvrir la nullité fondée sur les articles L121-21 4 et 5° du code de la consommation, la société prêteuse a commis une faute causant un préjudice aux emprunteurs, préjudice qui n’est pas une perte de chance. Du fait de la liquidation judiciaire de la société venderesse, les emprunteurs ne pourront récupérer auprès d’elle les sommes qui ont été versées en leur nom par la société prêteuse, de sorte qu’ils doivent être déchargés du remboursement du capital et que doivent leur être remboursées les sommes qu’ils ont versées en exécution du contrat de crédit (voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 5 avril 2018 RG n°16/07444).
Les autres demandes indemnitaires contre le prêteur La sanction du prêteur ne respectant pas les articles L311-6 etL311-8 du code de la consommation, en application de l’article L311-48, la déchéance du droit aux intérêts. 11 n’y a donc lieu à aucune autre indemnité à ce titre. Il n’est pas justifié que la banque SOLFEA ait été au courant de tromperie ou de réticences dolosives commises par la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE. Il n’est donc pas justifié qu’elle ait participé à un dol. Il n’est pas contesté que les travaux aient été effectués. La libération des fonds avant le délai prévu par la loi n’est sanctionné que par la nullité qui est déjà prononcé. La date de libération des fonds prêtés ne donne donc lieu à aucune indemnisation supplémentaire. Le moyen comme quoi le crédit serait un crédit immobilier doit être écarté car il est en contradiction avec l’ensemble des autres moyens auxquels il n’est pas précisé s’il est subsidiaire ou principal. En l’absence d’autres fautes que le défaut à l’obligation de vérifier conformité formelle et apparente du contrat principal, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’est redevable d’aucune autre indemnité.
Les autres demandes
Perdante, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera condamnée aux dépens. Il serait inéquitable de laisser à Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA la charge des frais de procédure exclus des dépens qu’ils ont engagés pour faire valoir leurs droits. La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera donc condamnée à leur verser 750 E au titre des frais de procédure exclus les dépens. L’exécution provisoire, compatible avec la nature financière de l’affaire, est nécessaire pour mettre fin à l’impayé.
PAR CES MOTIFS
Le juge d’instance, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et susceptible d’appel,
ANNULE le contrat :
– du 27 septembre 2012 liant la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE et Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA, – du 18 octobre 2012 liant Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la BANQUE SOLFEA ; DIT que Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA sont dispensés de rembourser le solde du capital emprunté à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ; CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à rembourser à Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA les sommes qu’ils lui ont versées ; CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER épouse ROMA sept cent cinquante euros (750 E) au titre des frais de procédure et aux dépens ; ORDONNE à la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE de récupérer l’installation photovoltaïque et de remettre la toiture en état après avoir averti de la date de ces travaux Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER au moins six semaines à l’avance ; DIT, qu’à défaut d’avoir averti Manuel ROMA et Nathalie GENTHIER de la date de ces travaux, la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE sera considérée comme ayant abandonné ces droits sur le matériel installé ; Assorti la présente décision de l’exécution provisoire. Ainsi prononcé et jugé à Sens, le DEUX MAI DEUX MIL DIX-HUIT.
LE GREFFIER,
Pour copie conforme Sens, le Le Greffier
LE PRÉSIDENT,