Jurisprudence — Photovoltaïque, démarchage à domicile, crédit accessoire
Arrêt de la Cour d’appel de Nîmes, chambre civile 1, du 6 février 2014 (n° 12/03195). Litige relatif à une installation photovoltaïque démarchée à domicile, nullité du contrat principal et du crédit affecté, obligations du prêteur et protection du consommateur.
Références officielles
- Juridiction : Cour d’appel de Nîmes, Chambre civile 1 (1re ch. A)
- Date : 6 février 2014
- Numéro : 12/03195
- Décision déférée : TGI Avignon, 19 juin 2012
- Nature : Arrêt par défaut, matière civile
Parties et représentants
Appelante
SA GROUPE SOFEMO, société anonyme à conseil d’administration (siège : 34 rue du Wacken, 67000 Strasbourg).
Intimés
- M. Robert M. et Mme Jocelyne M., particuliers (installation photovoltaïque litigieuse).
- Me Bernard ROUSSEL, mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur de la société GENELEC SOLAIRE.
Représentation & greffe
Représentants et avocats tels qu’indiqués au texte (SCP, SELARL, etc.). Greffier : Mme Véronique Laurent Vical. Formation de délibéré : M. Dominique Bruzy (Président), M. Serge Berthet (Conseiller), Mme Isabelle Thery (Conseiller).
Faits & procédure
Le 19 novembre 2009, les époux M. signent à domicile un bon de commande avec la société GENELEC SOLAIRE pour une installation photovoltaïque (montant 28 500 €), financée par un crédit consenti par SOFEMO. En mai 2011, GENELEC SOLAIRE est placée en liquidation judiciaire (Me ROUSSEL liquidateur). Les époux M. assignent GENELEC SOLAIRE et SOFEMO devant le TGI d’Avignon.
Jugement de première instance (19 juin 2012)
- Nullité du contrat principal (vente/installation).
- Nullité du contrat de financement accessoire.
- Condamnations (dommages-intérêts, mainlevée FICP, dépens, art. 700 CPC) selon modalités détaillées au jugement.
SOFEMO interjette appel. La mise en état est clôturée (30 mai 2013) et l’affaire plaidée le 10 juin 2013.
Prétentions des parties
Conclusions de SOFEMO (appelante)
- Recevabilité et bien-fondé de l’appel, réformation du jugement.
- Inapplicabilité du code de la consommation (contrat « commercial »), absence de démarchage à domicile.
- Demande de condamnation solidaire des époux M. au remboursement (28 500 € + intérêts).
- Subsidiairement, remboursement des fonds prêtés en cas de nullité confirmée.
- Article 700 CPC, dépens, anatocisme, etc.
Conclusions des époux M. (intimés)
- Confirmation de la nullité du contrat principal (irrégularités L121-21, L121-23 s. anciens) et du crédit affecté (L311-21 anc.).
- Manquements du prêteur (L311-20 anc.) à rapporter la preuve de la livraison/exécution ; attestation signée avant l’expiration du délai de rétractation.
- Demandes indemnitaires (D&I, art. 700 CPC), mainlevée FICP, fixation au passif de GENELEC SOLAIRE.
Motifs de la cour
1) Qualification « consommation » et démarchage
La cour retient que l’opération vise la réduction des dépenses énergétiques d’un particulier (non un engagement industriel), s’inscrivant dans une logique de consommation : le code de la consommation est applicable. Le contrat a été signé lors d’un démarchage à domicile et ne respecte pas les formes requises (notamment formulaire de rétractation et délai).
2) Nullité du contrat principal et effet sur le crédit
Constatant les irrégularités (L121-21, L121-23 s. anc.), la cour confirme la nullité de la vente/installation. En application de L311-21 anc., nullité du crédit accessoire.
3) Obligations du prêteur (L311-20 anc.)
Il appartient au prêteur de prouver la livraison/exécution. L’attestation produite, antérieure à l’expiration du délai de rétractation, est insuffisante ; les fonds ont été versés avant l’issue des délais légaux (déclaration de travaux, etc.). La demande de SOFEMO en remboursement contre les emprunteurs est donc rejetée.
4) Liquidation de GENELEC SOLAIRE
La condamnation en D&I est convertie en fixation de créance au passif (L622-21 c. com.).
Dispositif
- Réception de l’appel de SOFEMO.
- Confirmation de la nullité du contrat principal et du crédit accessoire ; rejet de la demande de remboursement dirigée contre les emprunteurs.
- Fixation de la créance de D&I des époux M. au passif de GENELEC SOLAIRE (montant re-tenu : 4 000 €).
- Article 700 (appel) : 3 000 € au profit des époux M.
- Dépens d’appel à la charge de SOFEMO.
Arrêt signé par M. Bruzy (Président) et Mme Laurent Vical (Greffier).
Points clés à retenir
Pour les consommateurs
- Le démarchage à domicile impose un formalisme strict : formulaire de rétractation, délais, informations.
- La nullité du contrat principal entraîne celle du crédit affecté (régime ancien L311-21).
- Le prêteur doit prouver la livraison/exécution avant déblocage (L311-20 anc.).
Pour les prêteurs/installateurs
- Débloquer des fonds avant l’expiration des délais légaux ou sur attestation irrégulière expose à un refus de remboursement.
- En cas de liquidation du vendeur, la créance de l’acheteur est fixée au passif (pas de condamnation directe à payer).
FAQ
La revente d’électricité rend-elle l’opération commerciale ?
Non, l’objectif principal est la réduction de dépense énergétique d’un particulier ; l’opération reste de consommation.
Que se passe-t-il si le contrat principal est nul ?
Le crédit affecté est également nul (régime applicable à la date des faits) ; le prêteur ne peut pas exiger le remboursement des emprunteurs si ses propres obligations n’ont pas été respectées.
Une attestation de livraison suffit-elle ?
Pas si elle est antérieure au délai de rétractation ou en contradiction avec les délais légaux ; la preuve de la livraison/exécution effective incombe au prêteur.
Texte intégral (extrait structuré)
En-tête officiel
COUR D’APPEL DE NÎMES — Chambre civile 1 (1re A) — Arrêt du 6 février 2014 — N° 12/03195 — République française, Au nom du peuple français.
Rappel succinct des mentions
Décision attaquée : TGI Avignon, 19 juin 2012 — Parties : SA GROUPE SOFEMO (appelante) / M. et Mme M. ; Me ROUSSEL ès qualités (Société GENELEC SOLAIRE en liquidation). Greffe, formation et déroulé des débats conformes aux mentions du texte.
Attendus majeurs (synthèse)
- Application du code de la consommation à l’opération photovoltaïque (particulier, finalité énergétique).
- Nullité du contrat de vente/installation pour manquements formels en démarchage (L121-21, L121-23 s. anc.).
- Nullité du crédit accessoire (L311-21 anc.).
- Charge de la preuve de la livraison/exécution à la charge du prêteur (L311-20 anc.) ; attestation irrégulière.
- Fixation des D&I au passif de la liquidation (L622-21 c. com.).